Un portait de Nouriel Roubini, un des économistes qui avait prévu le krach de 2008.
Nouriel Roubini est un économiste américain. Professeur à la prestigieuse Stern School fo Business à New York. Il avait anticipé avant tout le monde la crise des subprimes aux Etats-Unis, ce qui a contribué à faire de lui un gourou très écouté par les investisseurs.

Nouriel Roubini, alias « Docteur Catastrophe »

Des années durant, Nouriel Roubini avait annoncé qu’une grave crise financière surviendrait aux Etats-Unis. Les économistes en place et les gouvernants restèrent très sceptiques vis-à-vis de ses prévisions apocalyptiques. Son pessimisme permanent et ses critiques acerbes lui valurent le sobriquet de« Docteur Catastrophe ».
C’est en septembre 2006 qu’il annonce devant le FMI que « les Etats-Unis vont probablement se trouver confrontés à une chute sans précédent de l’immobilier, un choc prétrolier, un déclin rapide du moral des consommateurs et, à terme, une profonde récession. » Les économistes présents sont sceptiques, voire moqueurs. Mais il allait bientôt être vengé.
L’année suivante, en 2007, des sociétés de crédit immobilier font faillite, des hedge funds s’effondrent, la Bourse plonge, le chômage part à la hausse, et le dollar s’effrite. Dans le même temps, commencent à s’accumuler les indices d’une chute généralisée du marché immobilier américain et, à mesure que la crise du crédit se propage, un climat de panique s’empare des marchés financiers.
A l’été 2007, la banque centrale américaine (Fed) intervient pour la première fois, contre l’orthodoxie, en baissant les taux d’intérêt de 50 points de base et en rachetant des dizaines de milliards de dollars d’actifs toxiques. Quand en septembre 2007 Roubini revient parler devant le FMI, il prédit une grave crise de liquidité qui infectera tous les secteurs du système financier. Cette fois-ci, plus personne ne rit. Nouriel Roubini le fou, l’éternelle cassandre, est désormais le prophète, le sage qui a su voir venir la crise.

Mais comment a-t-il fait pour prédire la crise ?

Roubini a étudié de près les crises de la décennie 1990-2000 : Mexique en 1994,  Thailande, Indonésie et Corée en 1997 et 1998, Brésil et Russie en 1998, Argentine en 2000. A la suite de cette étude, il remarque que, à la veille de leur implosion, ces pays émergents ont tous les mêmes faiblesses : d’énormes déficits courants financés en s’endettant auprès d’étrangers, et des systèmes bancaires peu réglementés, gangrénés par un endettement excessif et un crédit trop facile.
Nouriel Roubini se demande alors : quel est le prochain pays qui succombera aux mêmes pressions ? Sa réponse, surprenante : les Etats-Unis. « Les Etats-Unis », se rappelle-t-il, « ressemblait au plus gros pays émergent de tous. » Bien sûr, les Etats-Unis n’étaient pas, et ne sont toujours pas d’ailleurs, une économie émergente. Mais cette conclusion inattendue sert de point de départ dans les analyses de Roubini, qui commence en 2004 à mettre en garde contre le colossal déficit courant américain, alors de 600 milliards de dollars.
Puis, de fil en aiguille, il étudie la croissance exponentielle du crédit après 2003, quand la Fed a abaissé les taux d’intérêt à presque zéro, et ses effets, dont la bulle immobilière. Roubini devient alors convaincu que cette bulle va éclater.
Et l’histoire lui a, « hélas » dira-t-on, donné raison.
Laurent Curau
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