Par
Eric Renard - le 15/04/2013
AVIS D'EXPERT - L'analyse du Pr Éric Renard du
département d'endocrinologie, diabète, nutrition, CHU de Montpellier et
Centre d'investigation Clinique Inserm CIC 1001.
Le traitement repose sur la pratique pluri-quotidienne d'injections d'insuline sous la peau pour assurer le maintien du taux de glucose (sucre) dans le sang (glycémie) dans une fourchette précise afin de permettre un bon fonctionnement de l'organisme: l'excès de sucre conduit à un état de fatigue chronique et à de graves lésions des vaisseaux sanguins tandis que le défaut de sucre altère la fonction cérébrale pouvant conduire au coma. L'ajustement des doses d'insuline est effectué par le patient en fonction des résultats de mesure du glucose dans une goutte de sang recueillie au bout du doigt plusieurs fois par jour.
Les repas, l'activité physique, le stress et de nombreux événements de la vie quotidienne influent sur la glycémie, ce qui rend l'adaptation des doses d'insuline très complexe, d'où une lourde contrainte pour les patients et un souci permanent du risque de variation glycémique délétère. Près de 25.000 patients se sont affranchis des injections par le recours à une pompe à insuline qui assure en continu un apport d'insuline que les patients programment selon les mesures de glycémie effectuées. Depuis une dizaine d'années, des capteurs de glucose sont disponibles qui estiment la glycémie en continu par une mesure du glucose sous la peau où ils sont insérés. Utiliser cette mesure du glucose en continu pour asservir la perfusion d'insuline par la pompe, c'est-à-dire réaliser une administration d'insuline «en boucle fermée», est le principe qui guide le développement d'un pancréas artificiel.
Restaurer la «possibilité d'insouciance»
Ces dernières années, la collaboration entre diabétologues, ingénieurs informatiques et mathématiciens a permis d'élaborer des algorithmes capables de prédire l'évolution glycémique et, à partir de là, la quantité d'insuline à perfuser à chaque instant pour maintenir la glycémie dans la norme. En 2011, la gestion de ces calculs algorithmiques par un smartphone mis au point par l'Université de Virginie (USA) a permis pour la première fois d'utiliser un pancréas artificiel en dehors de l'hôpital à Montpellier et à Padoue (Italie). Cette expérience d'administration automatisée d'insuline à partir des données d'un capteur de glucose sous-cutané sur la base du calcul des besoins effectué par le smartphone a été renouvelée chez une trentaine de patients par ce groupe de recherche franco-italo-américain. D'autres groupes de recherche développent des modèles similaires. Un tel dispositif permet de maintenir de façon automatisée la glycémie dans une fourchette proche de la norme, et surtout avec un moindre risque hypoglycémique, notamment la nuit.La sécurité et l'efficacité de ce modèle de pancréas artificiel vont être testées prochainement chez des patients diabétiques dans leur vie quotidienne pendant plusieurs semaines, puis plusieurs mois. À l'issue de ces essais cliniques, on entrevoit clairement l'entrée possible du pancréas artificiel parmi les options de traitement du diabète de type 1 pour les patients qui seront formés à son utilisation. L'implication des patients dans le «pilotage automatique» de leur pompe à insuline mais aussi la prise en charge des capteurs de glucose par l'assurance-maladie seront à ce stade les facteurs déterminants de la diffusion du pancréas artificiel, un dispositif performant qui restaure la «possibilité d'insouciance» pour des malades qui pensaient l'avoir définitivement perdue, comme l'expriment ceux qui en ont testé les premiers prototypes.
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